Boire la coupe jusqu'à la lie
Nuit blanche. A lire les mails, les sms, les courriers qu'ils ont échangés pendant dix mois - des dizaines par jour. A découvrir aussi que P. avait copié certains de mes fichiers, y compris la version non expurgée de mes écrits du mois de juin. Or je l'avais effacée, il a donc fallu qu'il aille fouiller dans les entrailles de l'ordinateur pour la récupérer, il n'a pas pu tomber dessus par hasard. Je savais, grâce au mouchard des "documents récents", qu'il était déjà allé fouiller dans de vieux fichiers à moi sans importance, mais portant tout de même la mention "perso", et qu'il avait recopié certains de mes mails à des amies...
Je lui en veux et je me méprise d'avoir fait la même chose que lui.
Je ne nous croyais pas capables d'autant de petitesse. "Bien fait ma
vieille, t'avais qu'à pas mettre ton nez dans ses affaires ; si t'avais pas cherché, t'aurais pas trouvé".
Il n'empêche, "c'est pas moi qu'a commencé !", je reste abasourdie.
J'y ai passé la nuit, à lire et à relire leurs
échanges ; jusqu'à l'écoeurement, jusqu'à la nausée. J'en tremble
encore, c'est à peine si je peux encore poser mes doigts sur le clavier
pour écrire ces lignes... Tout cela est très concret, à présent.
Impossible d'y échapper. Toutes ces tergiversations, ces hésitations,
ces aller-retours entre Elle et moi qui durent depuis plus d'un
an, ne prouvent qu'une chose : la petite lâcheté ordinaire d'un homme
qui ne sait pas choisir, qui veut "Le beurre, l'argent du
beurre, et la crémière avec" ! Et il lui a suffit d'attendre que l'une
de nous deux finisse par poser ses propres limites pour ne pas avoir à
prendre ses responsabilités ; limites qu'elle a posées au moins deux
fois
lorsqu'il a "rompu" avec Elle, et ce que je viens de lui offrir sur un
plateau à mon tour. Alors que dès le mois de mars, par peur de la
perdre définitivement, sans doute, il lui écrit qu'il a décidé de se
séparer de moi...
En effet, j'ai découvert qu'Elle lui a demandé clairement, dès le
mois de mars, - juste après leur "première" rupture - si oui ou non,
il était prêt à me quitter pour Elle, quel que soit le temps que ça
prenne, elle était prête à attendre, pourvu qu'il ait pris une
"décision intérieure" ; il s'est empressé de lui répondre qu'il
avait choisi son camp et
que c'est moi qu'il sacrifiait sur l'autel de sa passion naissante !
Pensez-donc, comment la sacrifier Elle, sa "jumelle astrale", son alter
ego (surdimensionné ! ça
c'est moi qui l'ajoute...) On ne peut tout de même pas laisser passer
une telle conjonction de planètes... et d'intérêts ! Car Madame peut
lui être très utile, professionnellement parlant, pour lancer sa
nouvelle activité : le siège sociale de leur "association" (à tous les
sens du terme) n'est-il pas à l'adresse personnelle de la Dame ? Ah !
la belle association que voilà, deux égotistes qui se mirent dans le
regard l'un de l'autre en s'utilisant mutuellement !
Oui, je l'avoue bien humblement, j'ai besoin de cracher mon venin ! Tout cela n'est que mauvaise foi, (o)rage et désespoir, j'en conviens, crise de jalousie, même - moi qui pensais ne l'être point, jalouse ! - Je me sens blessée, humiliée, lésée, manipulée. Je comprends mieux ce retour de flamme à mon égard ces derniers jours: il a obtenu de moi que je prenne la décision à sa place ! Je viens de lui retirer non pas une épine, mais un baobab, du pied !
Ce qu'il m'a dit en substance, il y a quelques semaines, c'est : "je vais te quitter, mais comme je n'en ai pas encore trouvé le courage, je ne peux pas te dire quand". Combien de temps encore aurais-je pu supporter cette situation avant de devenir folle ou aigrie au point de détruire et de sacager ce qu'il reste encore de beau entre nous ?
Je lui en veux tellement d'avoir fouillé dans mes affaires ! je me méprise tellement d'avoir fouillé dans les siennes ! Mais cette incertitude, ces doutes me rendaient folle. S'il a vraiment mis fin à leur relation en juin comme il me l'a dit, pourquoi l'avoir revue début novembre ? Pour discuter de leur association, collaborer à leur projet commun ? Sans reprendre leur liaison ? J'ai bien du mal à y croire...