Je suis en train de me rendre compte...
que le meilleur moyen d'aider
P., c'est... de ne pas l'aider, de ne pas répondre à ses demandes,
d'autant moins qu'elles sont maintenant clairement formulées, comme
s'il me donnait le mode d'emploi pour le rendre heureux à sa place. Ce
serait encore une façon de le conforter dans la croyance fausse que son
bonheur puisse venir de l'extérieur, et l'encourager à persister dans
cette illusion. Ce n'est pas à ses responsabilités de père ou d'époux
que je dois le renvoyer - même s'il ne faut pas qu'il les oublie ! -,
mais à sa responsabilité dans l'incapacité qu'il a à se rendre heureux
lui-même, puisqu'il vit dans l'insatisfaction permanente. Il cherche le
bonheur partout, toujours plus haut, toujours plus loin, (ascension
sociale, besoin de projets, demande de changement venant de moi,
nouveau regard venant d'Elle, préparation à une nouvelle vie
professionnelle), ... bref, partout, sauf à l'intérieur de lui.
Se
préparer à devenir thérapeute n'est pas anodin non plus. Et je me
demande aujourd'hui comment il va pouvoir "aider" les autres à se
(re)construire pour vivre plus heureux, lui qui n'y parvient pas pour
lui-même, lui qui est dans la destruction. Mais là encore, c'est
valorisant d'aider les autres (image), et puis ça permet de ne pas
avoir à "s'aider" soi-même (dé-responsabilisation)...
Je me suis trompée en lui disant l'autre jour que j'étais prête à lui "renvoyer l'ascenceur" - retravailler pour lui permettre de ne plus avoir à nous "(sup)porter" seul financièrement. Mais ça aussi c'est un leurre : parce que là encore, c'est le maintenir dans la croyance que son soulagement peut venir de l'extérieur, c'est me demander, à moi, de LE prendre "en charge".
Bref, il ne s'aime pas, et il attend des autres qu'ils l'aiment à sa place ; il n'est pas heureux, et il attend que son bonheur vienne de l'extérieur. Mais que fait-il, lui, pour s'aimer, pour se rendre heureux ? Il n'a pas arrêté de me dire, à un moment donné, que si moi j'avais la musique, lui il n'avait rien, qu'il ne faisait rien "pour lui". Mais qui l'en a empêché ???? Pas moi, en tous cas !
Ce doit en effet être terrible de se rendre compte qu'on fait soi-même son propre malheur...